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Pourquoi l’arrêt du tabac peut-il entraîner une prise de poids ?

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La prise de poids suite à l’arrêt du tabac est une réalité. En moyenne et au bout d’un an, un ancien fumeur aura gagné entre 2 et 5,5 kg, entre 4 et 5 kg après 10 ans(1). Mais la prise de poids reste très variable selon les individus : environ un tiers des ex-fumeurs conservent un poids stable, tandis que 15% d’entre eux environ perdent du poids. Comment expliquer de telles fluctuations de poids lorsqu’on arrête de fumer ? Grossit-on inéluctablement lors d’un arrêt du tabac ou y-a-t-il des moyens de garder une maîtrise de son poids ?

Le poids du fumeur

La majorité des études épidémiologiques indiquent que les fumeurs sont statistiquement à un poids inférieur à celui des non-fumeurs. Ce « sous-poids » s’explique entre autres par les propriétés intrinsèques de la nicotine présente dans le tabac.

  • La nicotine diminue l’appétit, la taille et la fréquence des prises alimentaires, car elle a un impact direct sur l’hypothalamus, centre de contrôle de la faim et la satiété. Elle comporte un effet satiétogène (« coupe-faim »), car elle augmente la sensibilité à la leptine, l’hormone de la satiété. Les répercussions évidentes sont une diminution de l’IMC chez les fumeurs(2).
  • Elle a également cet effet d’entraîner la hausse de la dépense énergétique, tant au repos que lors de la pratique d’une activité physique(3). Ce phénomène n’est pas encore parfaitement expliqué scientifiquement, mais pourrait être causé par un effet catécholaminergique (les catécholamines intervenant dans le l’équilibre métabolisme du glycogène), entrainant une thermogénèse plus importante.   
  • Enfin, la nicotine inhibe la mono-amine oxydase en charge de détruire une partie de la sérotonine. Le cerveau, en « trop-plein » de sérotonine, est en état de bien-être. Ainsi on constate chez les fumeurs moins d’appétence pour le sucre et une propension moindre aux « pulsions » alimentaires.

Mais la nicotine n’explique pas à elle seule l’IMC moindre des fumeurs.

  • Le plaisir de l’oralité alimentaire est remplacé par l’acte de fumer (porter à sa bouche une cigarette, un cigare…).
  • Le tabagisme entraîne une dégradation du goût, de l’odorat et de la palatabilité. Ainsi, l’acte de manger apporte moins de plaisir et de satisfaction à un fumeur qu’à un non-fumeur.

La prise de poids lors de l’arrêt du tabac

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Que se passe-t-il alors lorsqu’on arrête de fumer ? La prise de poids est entraînée par un ensemble de mécanismes, répertoriés dans le schéma ci-dessous(4).

Ainsi, arrêter de fumer engendre clairement un changement des comportements et habitudes alimentaires. Il s’explique par :

  • Une compensation alimentaire à la perte de l’oralité. On porte à la bouche des aliments plutôt qu’une cigarette…
  • La redécouverte du plaisir de manger – l’ex-fumeur retrouve peu à peu une perception plus fine des saveurs de l’alimentation, si bien qu’il est plus tenté de manger. En outre il recouvre l’odorat, si bien que certaines odeurs d’aliments, jusqu’alors imperceptibles, peuvent susciter chez lui appétit et envie de manger accrus.
  • La « carence » en nicotine entraîne mécaniquement un déficit cérébral de sérotonine. Ce déficit cause alors une plus grande propension aux grignotages, surtout sucrés.
  • Le phénomène de manque, puisque la nicotine est addictive, peut engendrer un stress accru. Le cerveau tentera de compenser par d’autres substances activant, comme la nicotine du tabac, le circuit de  la récompense.  C’est  par exemple le cas des aliments gras (les triglycérides agissent sur les circuits dopaminergiques), mais également du sucre(5).
  • L’arrêt du tabac provoque une moindre sensibilité (passagère) à la leptine. Ainsi, les anciens fumeurs ont tendance à être rassasiés moins rapidement. Les prises alimentaires sont donc souvent plus importantes, tant en quantité qu’en fréquence, lors d’un sevrage tabagique.
  • En général, on observe chez les fumeurs une moins bonne hygiène de vie générale : activité physique moindre (entre autres dû à la faible capacité cardiovasculaire), mais aussi moins bonnes habitudes alimentaires de base (les fumeurs mangeraient moins de fruits et légumes, fibres, céréales complètes ou produits laitiers que les non-fumeurs(6)). Ainsi, cette piètre hygiène de vie aurait un impact direct sur le poids, au sortir du tabagisme.
  • Enfin, la dépense énergétique induite par le tabagisme (entre 200 et 300 kcal par jour, selon la consommation de tabac quotidienne) est supprimée. Automatiquement, les calories brûlées auparavant ne le sont plus, et on est ainsi plus enclin à prendre du poids.

Comment faire pour éviter de prendre du poids, à l’arrêt du tabac ?

Au préalable, il est nécessaire de faire deux rappels :

 

  • Une prise de poids modérée n’a rien de dramatique, surtout lorsqu’on considère les méfaits causés par le tabac – maladies cardiovasculaires, troubles respiratoires, allergies, asthme, maladies digestives, cancer….
  • Bien souvent, le fumeur est en fait en dessous du poids qui serait naturellement le sien, s’il ne fumait pas. Aussi, à l’arrêt du tabac, la prise de poids ne serait que le « rattrapage » du poids perdu.

Ensuite, on dispensera des recommandations liées au mode de vie :

  • Lors de l’arrêt du tabac, l’accroissement de l’activité physique est de rigueur. Il est primordial de faire du sport, tant pour augmenter la dépense énergétique (y compris au repos, grâce au développement de la masse musculaire) que pour pallier le phénomène de manque et le stress qui s’en suit.
  • Du point de vue alimentaire, il est conseillé de consommer des aliments rassasiants. Les fruits, légumes et céréales complètes, riches en fibres, permettent d’atteindre rapidement la satiété. Par ailleurs les protéines (de préférence maigres), longues à digérer, sont efficaces pour atteindre un rassasiement durable.
  • Les fringales, communes lors de l’arrêt du tabac, devront être comblées par une collation saine aux vertus « coupe-faim » : fromage blanc, œuf dur, fruit (comme la pomme ou la banane), poignée d’oléagineuses…
  • Une restriction alimentaire est déconseillée. L’arrêt du tabac est déjà, en soi, source de stress. Imposer un régime strict à un individu en plein sevrage risque d’avoir un effet contre-productif : non seulement le succès du sevrage sera compromis mais en plus, on risque de perturber davantage un métabolisme qui l’est déjà.
  • Une éventuelle supplémentation en nicotine via substituts nicotiniques (gommes, patch, spray)  prescrite par le médecin traitant, peut faciliter le sevrage complet et, en outre, éviter une prise de poids trop importante et/ou brutale. 

Références

(1)    2010, Lecerf, Tabagisme et poids – Smoking and weight

(2)    1999, Miyata, Meguid, Fetissov, Torelli, Kim, Nicotine’s effect on hypothalamic neurotransmitters and appetite regulation

(3)    2021, Schwartz, Bellissimo, Nicotine and energy balance: A review examining the effect of nicotine on hormonal appetite regulation and energy expenditure

(4)    Institut Pasteur, Service Nutrition

(5)    2021, Le Journal du CNRS, Comment le cerveau gère notre appétit

 

(6)    1992, Nuttens, Romon, Ruidavets, Arveiler, Ducimetiere, Lecerf, Richard, Cambou, Simon, Salomez, Relationship between smoking and diet: the MONICA-France project

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